Les activités du quotidien se révèlent parfois difficiles quand on est sujet à une sciatalgie et franchement handicapant chez la femme enceinte… Voyons un peu pourquoi votre grossesse vous prédispose à ce genre de péripétie et comment soulager cette douleur pendant la grossesse.

Mais qu’est-ce qu’une sciatalgie ?

La sciatalgie a été définie comme une douleur dans la région fessière (1) (2) souvent associé à des irradiations dans la partie postérieure de la cuisse (3). Le nombre de femmes souffrant de douleur sacro-iliaque pendant la grossesse est considérable, pouvant atteindre jusqu’à 95 % des femmes enceinte (4) (5) (6) (7) (8). La sciatalgie a un pronostic plus douloureux que la lombalgie (3). Elle est associée à des déficits physiques plus importants et elle est plus difficile à traiter que la lombalgie chez la femme enceinte (9). Ces résultats sont confirmés par l’étude menée par O. Kogstad (10) qui a montré que l’intensité de la douleur enregistrée pendant la grossesse était plus élevée chez les femmes souffrant de douleurs sacro-iliaques que chez les femmes souffrant de douleurs de dos (10). La douleur ressentie dans les fesses, les lombaires et les jambes est décrite comme une douleur constamment déchirante et sourde (5) (8). La capacité permanente à se déplacer, s’asseoir et/ou se tenir debout est considérablement réduite et entraîne des déficiences physiques considérables chez les patientes (9) (11) (12) (8). D’ailleurs, l’incidence des « douleurs sacro-iliaques entraînant une perte considérable des fonctions quotidiennes » a été rapporté chez environ 14 % des femmes (13). Malgré ces chiffres, on estime que plus de 50% des femmes bénéficient de peu ou pas d’intervention de gestion de la douleur (14) (15) (16). L’apparition de douleurs à la ceinture pelvienne commence souvent à la fin du premier trimestre et jusqu’au premier mois après l’accouchement (17) (18). Selon l’opinion générale, le pic de douleur se situe souvent entre la 24eme et la 36eme semaine de grossesse (17) (18).

Mais pourquoi ?

L’épidémiologie et la physiopathologie de la douleur lombo-pelvienne pendant la grossesse ont été examinées de manière approfondie (1) (23). Cependant, il existe encore des ambiguïtés concernant les examens complémentaires et les traitement appropriés à réaliser pendant la grossesse (24) (25) (26). Les préoccupations relatives au bien-être maternel et fœtal impliquent l’utilisation de schémas thérapeutiques préventifs et conservateurs (27). À ce jour, on sait peu de choses sur la prévention des douleurs de la ceinture pelvienne pendant la grossesse (1). Toutefois, plusieurs approches thérapeutiques ont été décrites dans la littérature médicale.

Les programmes de prévention enseignés aux femmes enceintes basés sur l’anatomie, l’ergonomie, les postures correctes, la relaxation et la gestion de la douleur favorisent la prise de conscience des avantages d’être actif et de prendre soin de soi, réduisent potentiellement la gravité des douleurs et l’invalidité qui en résulte (1) (28). Au Royaume-Uni, l’Institut national de la santé informe que « les cours en groupe de prévention de la douleur » contribuent à réduire les douleurs lombo-pelviennes pendant la grossesse (29). Les données sur la kinésithérapie dans la gestion de la douleur lombo-pelvienne pendant la grossesse sont équivoques. Les résultats de 2 méta-analyses récentes diffèrent l’un de l’autre (30) (31). L’exercice ne semble pas bénéficier aux patientes atteintes de sciatalgie (32) (33) (34) mais elle est souvent recommandé pendant la grossesse car il s’agit d’une intervention non invasive, peu risquée (35) et peu coûteuse, qui peut avoir des avantages en plus de soulager les maux de dos (29) (35) (36) (37). L’exercice prévient la prise de poids excessive chez la mère et le fœtus, prévient et contrôle le diabète gestationnel et améliore la santé cardiorespiratoire (35) (36). En 2018, une méta-analyse de onze études sur 2347 femmes enceintes (38), a montré que l’exercice physique réduit de 9% le risque de lombalgie pendant la grossesse et de plus de de 20% les congés maladies qui y sont associés mais il n’y a aucune preuve claire d’un effet sur les douleurs de la ceinture pelvienne et notamment les sciatalgies. Les dispositifs de soutien comme les ceintures pelviennes semblent pouvoir limiter la laxité des articulations sacro-iliaques et soulager les symptômes sans présenter de danger (39). Bien que les études utilisant le yoga pour soulager la sciatalgie au cours de la grossesse soient rares, la méta-analyse de populations non enceintes ayant des sciatalgies a mis en évidence des preuves de son efficacité (40). Deux études soutiennent l’utilisation de l’acupuncture pour la gestion de la sciatalgie pendant la grossesse (41) (42).

De plus en plus de femmes utilisent les médecines parallèles et complémentaires pendant leur grossesse, notamment des thérapies manuelles telles que le massage, la chiropractie et l’ostéopathie (43). En effet, les recherches indiquent que les femmes enceintes utilisent fréquemment des thérapies complémentaires pour gérer leurs problèmes liés à la grossesse (44).

L’ostéopathie, le meilleur allié de la femme enceinte

L’utilisation du traitement ostéopathique pendant la grossesse a une longue tradition. Des articles d’ostéopathie en obstétrique, ont été publiés dans la seconde moitié du siècle dernier, abordant de manière récurrente le thème de la réduction de la douleur pendant la grossesse (45) (46) (47).

D’un point de vue ostéopathique, la sciatalgie est secondaire à une instabilité des articulations sacro-iliaques. Klein et Sommerfeld (48) définissent une sacro iliaque instable comme une sacro-iliaque hypermobile causant des douleurs. Comme la sacro-iliaque est une articulation plane avec des arêtes et/ou des bosses, qui augmentent normalement la stabilité, une articulation sacro iliaque très lâche (ou très instable) entraîne un pseudo blocage à la fin de l’amplitude du mouvement. La sciatalgie est donc secondaire a un blocage de l’articulation sacro-iliaque par un verrouillage des surfaces articulaires (49). Ce schéma complexe constitue un défi de taille pour le thérapeute : traiter une articulation bloquée qui est avant tout hypermobile. Une articulation hypermobile en elle-même ne provoque pas de douleur, mais les structures qui l’entourent, telles que les ligaments, la capsule articulaire, les muscles ou même les nerfs, sont irritées (50) (51).

Il y a de plus en plus de preuves scientifiques que l’ostéopathie est bénéfique pour le traitement des femmes atteintes de lombo-sciatalgie (52) (53). En 2015, Majchrzycki et al. (53) ont examiné la littérature et conclu que l’ostéopathie semble être un traitement sûr et efficace contre les douleurs pelviennes et notamment les sciatalgies chez les femmes enceintes. En 2017, Franke et al. (52) ont signalé des preuves à l’appui du traitement ostéopathique pour la douleur et l’état fonctionnel de la lombo-sciatalgie chez les femmes enceintes. Les études récentes sur l’efficacité de l’ostéopathique sur les douleurs sacro-iliaques ont constaté que ostéopathie réduit les douleurs de sciatalgie et la progression du dysfonctionnement biomécanique pendant la grossesse (54) (55). En 2014, une étude (56) a montré que ostéopathie chez la femme enceinte réduisait de 68 % la douleur de sciatalgie et de lombalgie et améliorait l’incapacité fonctionnelle d’environ 28 %. Six études ont démontré des effets positifs en faveur du traitement ostéopathie contre la douleur des femmes enceintes (57) (58) (56) (59) (54). En ce qui concerne l’état fonctionnel, 5 études ont montré des effets positifs en faveur de l’ostéopathie (54) (57) (59) (58) (56). Rohrich (59) a prouvé que le traitement ostéopathique chez la femme enceinte entraîne une diminution de 60 % de l’intensité des douleurs.

Quels sont les bons conseils à adopter pour soulager votre sciatalgie et/ou douleur sacro-iliaque pendant votre grossesse ?

Dans un premier temps, ce que vous devez éviter de faire !

  • Ne restez pas immobiles sans bouger, cela pourrait au contraire aggraver la situation.
  • Attention à votre posture, évitez surtout les jambes croisées au travail, de creuser le bas du dos !
  • Ne pas porter de talons hauts (ils vont augmenter la courbure en extension des lombaires).
  • Ne pas porter de charges lourdes. Ne pratiquez pas les mêmes gestes qu’en dehors de votre grossesse, votre organisme a changé donc prenez en compte.
  • Ne pensez pas que cette sciatalgie passera toute seule, car c’est la meilleure façon de laisser votre douleur devenir inflammatoire et de la laisser s’installer dans le temps.

Et maintenant, que faire pour soulager votre sciatique ?

  • La première chose à faire ? Bougez, marchez, ne vous effondrez pas dans votre lit en vous disant que ça passera tout seul. Comme l’indique l’assurance maladie, le meilleur traitement, c’est de bouger !
  • Une petite bouillotte au niveau de la fesse ou un bain chaud peut calmer votre crise de sciatique ponctuellement.
  • En position assise : soulagez votre dos à l’aide d’un coussin d’allaitement.
  • En position allongée sur le dos : pensez à surélever vos jambes avec un coussin sous les genoux par exemple (cela aidera à ce que votre bas du dos soit moins creusé) ou à dormir sur le côté avec le coussin d’allaitement. Le coussin d’allaitement, vous permet de caller votre ventre et de faire reposer votre cuisse sur le coussin permettant de décomprimer le bassin.
  • Pour sortir du lit : mettez-vous de côté, croisez la jambe du haut sur celle du dessous et utilisez vos mains pour vous redresser.
  • Optez pour des positions où les jambes sont libérées afin que le bassin reste ouvert. Vous pouvez utiliser par exemple un ballon.

Mais encore…

  • Faire des exercices adaptés à la grossesse : L’achat d’un ballon de grossesse est une bonne idée. Il permettra de vous étirer tout en travaillant le périnée. A la maternité de l’Hôpital Franco-Britannique, des « cours d’autogestion de la douleur pendant la grossesse et l’accouchement », vous sont proposés. Les cours reposent sur un programme de prévention des douleurs basés sur l’anatomie, l’ergonomie, les postures correctes, la gestion de la douleur par des techniques de mobilisation douces à pratiquer seule ou en couple.
  • Etirez-vous en douceur. Votre ostéopathe pourra vous indiquer des étirements appropriés et notamment l’étirement du pyramidal du bassin.

Bibliographie