Votre bébé régurgite après la tétée ? A des douleurs ou de l’irritabilité au moment de téter ou de boire son biberon ? Votre bébé a des troubles du sommeil ? Il présente des problèmes respiratoires comme de la toux ou des bronchospasmes à répétition ? Il est alors possible qu’il souffre de reflux gastro-œsophagien (RGO).

Le RGO c’est quoi ?

Le RGO ou reflux gastro-œsophagien est une pathologie existante tant chez l’adulte que chez l’enfant, mais il est très fréquente chez le nouveau-né. C’est l’une des causes les plus courantes de symptômes digestifs chez les enfants (1) (2). C’est un remontée involontaire du contenu gastrique dans l’œsophage avec ou sans régurgitation externe (3) (4). En cas de régurgitation simple, il s’agit d’un phénomène physiologique normal et spontanément résolutif chez le nourrisson en bonne santé (4) (5) (6). Inversement, lorsque le reflux du contenu gastrique provoque des symptômes gênants et / ou des complications, on parle de RGO compliqué. La prévalence de la régurgitation chez les nourrissons atteint son maximum à l’âge de 4 mois et 50 à 85 % des nourrissons ont une régurgitation au moins une fois par jour (5) (7) (8) (9).  Le RGO survient chez près des deux tiers des nourrissons de moins de 4 mois, dont plus de la moitié deviennent asymptomatiques avant l’âge de 10 mois et 80 % à l’âge de 18 mois (10) (11).

Qu’est-ce qui provoque ses RGO ?

Le relâchement transitoire et inappropriée du sphincter inférieur de l’œsophage est le principal mécanisme conduisant au RGO (5). Normalement cet “anneau” s’ouvre pour laisser passer les aliments de l’œsophage à l’estomac et se ferme pour éviter les remontées. Ainsi en cas de RGO, les aliments ne sont plus bloqués dans l’estomac et remontent vers la bouche. Chez le bébé, ce sphincter est souvent immature à la naissance et il va naturellement se renforcer peu à peu, dans les premiers mois de vie. Le relâchement du sphincter inférieur de l’œsophage est favorisé par la distension gastrique et l’augmentation de la pression intra-abdominale. Les nouveau-nés souffrent de régurgitations probablement aussi à cause du régime liquide et de la posture en position couchée  (6) (12). Lors de reflux trop fréquent, le RGO peut finalement devenir pathologique, bien que cette différenciation soit difficile à définir. Les recommandations conjointes de les Société nord-américaine (NASPGHAN) et européenne (ESPGHAN) de gastroentérologie pédiatrique définissent le RGO Pathologique comme une remontée du contenu gastrique provoquant des symptômes « gênants » (13). La définition des symptômes « gênants » chez les nourrissons est vague en raison de l’absence de description des signes par le bébé qui ne peut pas s’exprimer par la parole.

Comment faire la différence entre de simple Régurgitation et le RGO compliqué chez un bébé ?

  • Le reflux gastro-œsophagien simple  dit Régurgitation Simple se manifeste par une expulsion spontanée d’une petite quantité de lait (5 à 10ml) qui se fait sans effort. Cela correspond à un liquide blanchâtre, mélange de lait et de salive et se produit le plus souvent peu après la prise alimentaire. Ceci est inconfortable pour bébé mais pas d’inquiétude à avoir tant que cela n’affecte pas son appétit et sa prise de poids. Les Régurgitation se produisent chez 40 à 65% des nourrissons en bonne santé âgés de un à quatre mois (14).
  • Le reflux gastro-œsophagien compliqué se produit lorsque le reflux du contenu gastrique provoque des symptômes gênants, affectent la qualité de la vie ou provoquent des complications. Cela s’accompagne de pleurs, d’inconforts avec un bébé qui aura tendance à beaucoup se cambrer en arrière lors de la digestion. Il peut avoir des douleurs ou de l’irritabilité au moment des repas, des pleurs et agitation pendant et après la tété, des troubles du sommeil avec des réveils nocturnes, des postures asymétriques du cou (syndrome de sandifer), des problèmes respiratoires comme de la toux, un gain de poids insuffisant (5) (15) (9). Ghaem et al. ont montré que les nourrissons atteints de RGO présentaient une prévalence plus élevée de troubles du sommeil et un retard significatif du sommeil la nuit (16). Plusieurs études ont suggéré un lien entre le RGO et les symptômes respiratoires et un certain nombre de mécanismes physiopathologiques sont proposés pour l’expliquer, notamment l’aspiration du contenu gastrique dans l’arbre respiratoire (17) (18). Attention le RGO n’est pas forcément synonyme de régurgitations, en effet, le contenu gastrique peut sortir de l’estomac, remonter dans l’œsophage sans pour autant remonter jusqu’à la bouche. Les symptômes gênants du RGO sont souvent non spécifiques et peuvent être causés par d’autres affections liées à l’enfance, telles que l’allergie aux protéines du lait de vache, la sténose du pylore, la suralimentation, la fistule trachéo-œsophagienne ou la constipation (19). Chez les enfants, la prévalence des allergies alimentaires est estimée à environ 6 à 18% (20) (21).

Allergie aux protéines de lait de Vache et RGO ?

La régurgitation et les vomissements sont des manifestations cliniques bien connues de l’allergie alimentaire, principalement de l’allergie aux protéines du lait de vache (ACPM), qui représente l’allergie alimentaire la plus répandue chez les jeunes enfants (19). Nielsen et al. ont montré que 56% des enfants atteints de RGO grave présentaient un allergie aux protéines de lait de vache (22). Des études antérieures sur l’allergie alimentaire associée à des RGO chez les enfants ont montré des résultats similaires indiquant une association chez 43% à 48% des enfants (23) (24). Alors que la prévalence des diagnostics de RGO et d’allergies alimentaires a augmenté au cours de la dernière décennie, parallèlement à l’augmentation du nombre de prescriptions d’inhibiteurs de la pompe à protons et d’antagonistes des récepteurs H2, des questions se posent quant aux effets possibles d’une modification du pH gastrique sur le développement de l’allergie alimentaire (19). D’après des études chez l’animal, les médicaments antiacides entravent la digestion gastrique des protéines, avec le potentiel de formation de nouvelles protéines alimentaires, susceptibles de favoriser la synthèse des IgE spécifiques et de provoquer une allergie alimentaire (25). Trikha et al. ont montré que les enfants exposés à des inhibiteurs de l’acide gastrique dus au RGO étaient deux fois plus susceptibles de recevoir un diagnostic d’allergie alimentaire après un an de traitement que les témoins sains (26).

À quel âge cesse le reflux gastro-œsophagien ?

En règle générale, les régurgitations atteignent leur maximum à 4 mois (67%), commencent à diminuer vers 6 à 7 mois (21%) (15) et disparaissaient entre 10 et 14 mois (5%) lorsqu’ils passent à un régime plus solide et acquièrent une maturation neurodéveloppementale et une posture plus droite (6) (7) (27). Pourtant, dans une étude chez des jeunes adultes diagnostiqués dans l’enfance avec un RGO, il a été montré que près de 80% de ces patients présentaient au moins une fois par mois des brûlures d’estomac et/ou une régurgitation et un tiers prenait des médicaments antisécrétoires ou des inhibiteurs de la pompe à protons (28). Une autre étude suggère que chez un pourcentage important d’enfants atteints de RGO, les symptômes peuvent persister tout au long de l’adolescence jusqu’à l’âge adulte (19).

Le traitement du Reflux, un réel défi

Malgré la forte prévalence de la maladie, le RGO reste un défi, même pour le clinicien expérimenté. La gestion conservatrice est l’approche actuelle de première ligne en matière de RGO infantile. Cela va des modifications de l’alimentation et de la posture à la modification du régime alimentaire des nourrissons. Il existe des preuves de l’efficacité des épaississants pour lait infantile dans la réduction de la régurgitation visible (29) (30) (31) (32). Cependant, les épisodes de régurgitation interne ne sont probablement pas réduits (29). Les patients atteints de RGO douloureux peuvent également bénéficier d’un changement de position du corps, en les maintenant verticalement ou en position ventrale éveillée sous surveillance après les tétés (33) (34). Cependant, en raison de l’incidence accrue du syndrome de mort subite du nourrisson, il est déconseillé de mettre les bébés couchée sur le ventre pendant leur sommeil (4). Si cette prise en charge initiale n’améliore pas les symptômes, en raison du chevauchement fréquent entre le RGO et l’allergie aux protéines de lait de vache, les recommandations pédiatriques actuelles préconisent un essai de régime sans protéines de lait de vache de 2 à 4 semaines, soit en excluant le lait de l’alimentation maternelle du nourrisson allaité, soit en utilisant une préparation hydrolysée chez le nourrisson non allaité (19). En cas de signes douloureux trop important, les médicaments antisécrétoires constituent le traitement médicamenteux de base des patients atteints de RGO (19).

Et comment l’ostéopathie peut-elle soulager le RGO de mon bébé ?

Nombreux gastroentérologues s’entendent sur le fait que les nouveau-nés souffrent de régurgitations probablement à cause du régime liquide, de la posture en position couchée, d’un relâchement du sphincter inférieure de l’œsophage favorisé par la distension gastrique et l’augmentation de la pression intra-abdominale (5) (6) (12). Plusieurs études ostéopathiques sur l’adulte (35) (36) (37) (38) corroborent cette hypothèse de l’apparition du Reflux secondairement à un relâchement du sphincter inférieur de l’œsophage. En modifiant la posture dorso-lombaire et les tensions viscérales et musculaires notamment au niveau du diaphragme, l’ostéopathie favorise une diminution de la pression intra abdominale, une amélioration de l’activité gastrique (39) entrainant une meilleure fermeture du sphincter inférieur de l’estomac. D’autres études (40) (41) confirment que le traitement ostéopathique par son action sur le diaphragme augmente considérablement la tonicité du sphincter inferieur de l’œsophage et permet ainsi la fermeture de cette valve en dehors des repas. L’efficacité du traitement ostéopathique a aussi été démontré en mesurant le PH salivaire (42). Il a été prouvé que suite à l’intervention ostéopathique, le PH est nettement moins acide et donc moins corrosif pour l’œsophage, limitant ainsi les risques de brulure de l’œsophage.

Chez le bébé, l’apparition du RGO est peut-être aussi d’ordre neurologique. Méconnu médicalement, l’explication vient du fait que les nerfs qui contrôlent notamment la déglutition et la digestion passent au niveau occipitale (nuque). Cette zone peut subir des contraintes et irriter le passage des nerf crâniens N°10 (nerf vague), nerf n° 9 (glosso-pharyngien) et le nerf 12 (hypoglosse) pendant la grossesse, lors de l’expulsion et parfois après la naissance. Dès lors toutes les irritations et compressions de ces nerfs peuvent engendrer une dysfonction du fonctionnement du sphincter inférieur de l’œsophage favorisant un RGO. Des études ont montré que la correction tissulaire de la base du crane et de la colonne supérieure chez l’enfant réduit les symptômes gênants du RGO (43) (44).

Ainsi, Le choix des axes de travail sont différents d’un bébé à l’autre simplement car les reflux peuvent être causés par un ou plusieurs facteurs qui diffèrent d’un enfant à l’autre.

En complément du traitement ostéopathique, Il est possible de diminuer la survenue des régurgitations en appliquant quelques conseils pratiques concernant l’alimentation :

  • Respecter les quantités. Ne confondez pas un besoin de succion et un besoin de manger. N’oubliez pas que si l’estomac de l’adulte peut être comparable à un ballon de baudruche qui peut varier de volume, celui de votre bébé est un seau qui déborde si on le rempli de trop…
  • Faire attention à ce que le nourrisson n’ingurgite pas trop d’air (vérifier que sa tétine soit remplie de liquide mais pas d’air).
  • Régler la vitesse si cela est possible de la tétine, sinon incliner le biberon vers l’horizontale tout en vérifiant le premier principe. Si du lait sort de la bouche de bébé pendant qu’il tète, le débit est trop important pour lui.
  • Veillez à ce que des bulles se créent au moment de la tétée. Si ce n’est pas le cas, desserrer la bague du biberon, ça devrait être mieux.
  • Ne pas hésiter à faire une pause pendant le repas et à lui faire faire son rot, plus il évacue l’air de son estomac, moins votre bébé sera sujet à régurgiter. Si cela ne vient pas et qu’il réclame trop, c’est reparti.
  • Eviter tout ce qui pourrait comprimer l’abdomen du bébé pendant son repas (votre avant-bras mal positionné, votre ventre, etc…)
  • Et ne pas sauter le rot à la fin du repas ! Prendre son temps pour que votre bébé fasse son rot et ses gaz avant de le recoucher.
  • Enfin ne pas mettre sur le dos votre bébé de suite après un repas, la position dorsale favorise les remontées alimentaires. Par contre sous surveillance et éveillé, vous pouvez mettre votre bébé sur le ventre. Cette position favorise la sortie du rot et la digestion comme plusieurs études médicales l’ont prouvé mais attention ne jamais laisser dormir votre bébé sur le ventre à cause de la Mort Subite du Nourrisson.
Bibliographie